Une approche globale pour mieux affronter les changements climatiques

Les changements climatiques imposent de faire les choses différemment. Une approche connue de longue date mais peu utilisée en agriculture permet de jeter un regard global sur les fermes et améliorer durablement leurs pratiques : l’approche systémique.

Imaginez que vous êtes propriétaire d’une ferme et qu’un ou une agronome vous suggère d’ajouter une culture de couverture à votre rotation. À première vue, ça semble simple, mais votre expérience vous dit que ce n’est pas le cas. En effet, pour bien intégrer cette nouvelle culture à votre rotation, vous devez aussi considérer la disponibilité des semences et leur coût, leur fertilisation, la machinerie nécessaire pour la récolte, votre capacité d’entreposage, voire vos circuits de vente.

Malheureusement, les recommandations des agronomes tiennent rarement compte de toutes leurs ramifications, mais… ce n’est pas entièrement de leur faute. « Les facultés d’agronomie elles-mêmes sont segmentées : elles hébergent un département des sols, un département en phytologie et un autre en santé animale, dit Jacques Nault, cofondateur et vice-président agronomie chez Logiag. Il n’y a jamais de département d’intégration des pratiques agricoles! ». Concrètement, c’est donc le producteur ou la productrice qui, une fois sur le plancher des vaches, doit composer avec les conséquences parfois inattendues des recommandations de son agronome.

Logiag a décidé de faire les choses un peu différemment. Pour accompagner les fermes en transition climatique, nos agronomes utilisent une méthode prometteuse mais peu répandue : l’approche systémique ou whole farm approach. Contrairement aux méthodes plus traditionnelles, l’approche systémique considère toujours les fermes de manière globale, ce qui permet de mieux arrimer les recommandations agronomiques entre elles et éviter d’éventuels effets indésirables.

Une autre façon de voir les fermes

L’approche systémique a deux grandes caractéristiques : elle ne regarde pas les fermes comme un ensemble d’opérations plus ou moins indépendantes, mais comme un tout, tout en tenant compte de chacun de leurs composants et de leurs interactions. Grâce à ce regard global, l’approche systémique permet d’améliorer autant la santé financière de la ferme que la santé de ses sols, tout en contribuant à lutter contre les changements climatiques. Bien appliquée, elle permet d’améliorer les conditions et le fonctionnement d’une ferme de manière progressive et durable.

Par exemple, l’approche systémique peut aider une ferme à semer suffisamment de fourrages pour alimenter son troupeau, à produire juste assez de fumier pour nourrir ses champs ou à élever juste assez de génisses pour répondre à ses quotas laitiers. Qu’importe le mandat, l’objectif ne change pas : mieux arrimer entre elles toutes les parties des fermes grâce à la valorisation accrue de leurs ressources internes, une utilisation minimale d’intrants, une réduction des pertes de nutriments et une maximisation du carbone organique du sol. Enfin, parce que l’approche systémique aide les fermes à mieux gérer leurs ressources, elle contribue aussi à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES).

Une analyse complète, des intrants au produit fini

L’approche systémique commence par une analyse de l’ensemble d’une ferme à l’aide des données de son PAEF, de ses inventaires de GES, de la rotation et de la productivité de ses cultures, de son bilan nutritif et de l’égouttement de ses sols, entre autres.

Le bilan nutritif, par exemple, évalue combien de potassium, d’azote et de phosphore la ferme reçoit et rejette. L’idéal est d’atteindre un équilibre, c’est-à-dire que chaque intrant est constamment recyclé et ne ressort jamais de l’exploitation. En termes clairs, cela peut vouloir dire que les engrais épandus dans les champs servent à des cultures destinées à l’alimentation des animaux et que leurs déjections… fertilisent les champs. Évidemment, cela signifie aussi que la ferme a réduit au minimum l’érosion de ses sols ou la volatilisation de ses intrants et que ses champs n’accumulent pas inutilement des nutriments.

Déterminer le bon nombre de génisses à élever

L’approche systémique permet de bien comprendre les nombreuses ramifications d’un défi qui confrontent plusieurs fermes du Québec : le manque ou le surplus de génisses.

Plusieurs fermes laitières au Québec élèvent trop de génisses, souvent parce qu’elles gardent systématiquement toutes celles qui naissent sur l’exploitation. Pourtant, cela nuit à leur rentabilité. Ces génisses « en trop » doivent être nourries, soignées et logées. De plus, l’espace qu’elles occupent pourrait trouver un meilleur usage, par exemple, pour améliorer les conditions de vie des autres animaux. Enfin, pour se servir malgré tout de leurs génisses excédentaires, bien des fermes retirent des vaches de leur troupeau plus tôt que prévu, ce qui entraîne encore d’autres pertes.

Cela dit, conserver trop peu de génisses n’est pas mieux! Ça peut entraîner une pénurie de vaches matures et, donc, une production laitière inférieure aux quotas. Les fermes dans cette situation doivent parfois se résoudre à conserver des vaches de moindre qualité ou acheter en urgence des animaux supplémentaires dont le prix, la génétique ou la santé ne répondent pas tout à fait à leur système de production.

Bref, le nombre de génisses d’une ferme est une question qui dépasse largement l’étable. Elle peut affecter autant sa rentabilité que la santé ou la génétique de ses animaux.

Cependant, trouver le bon nombre de génisses à élever (et le maintenir!) exige un bon système de gestion. Celui-ci doit permettre de : planifier la reproduction des vaches, surveiller la croissance et l’alimentation des génisses, contrôler leur santé et leur bien-être et assurer des suivis et des évaluations. En somme, trouver le bon nombre de génisses demande une vision globale de la ferme, qui prend en compte à la fois les données du champ, du silo et de l’étable.

Produire soi-même des fourrages en quantité et de qualité suffisantes

L’approche systémique est également utile pour évaluer les besoins fourragers. Cette évaluation demande d’abord de regarder la taille du troupeau. De cela découle le nombre d’hectares requis pour cultiver assez de fourrages pour nourrir les bêtes et le choix des semences qui produiront un fourrage de la qualité désirée. Il ne reste alors qu’à intégrer ces cultures dans un assolement, c’est-à-dire un plan de rotation qui inclut des parcelles réservées à l’alimentation du bétail.

Un assolement bien conçu produit des fourrages de qualité, ce qui réduit les pertes et, donc, les coûts de l’alimentation animale. Cette alimentation maison contribue aussi à la bonne santé et à la productivité des animaux. En autant, bien sûr, qu’elle soit entreposée adéquatement!

Se mettre en action

Bien que l’approche systémique regarde l’ensemble des composants d’une ferme, elle ne recommande jamais de modifier toutes ses opérations d’un coup. Au contraire, le producteur ou la productrice choisit quelques pratiques à implanter progressivement sur une période de cinq ans, en collaboration avec son agronome.

Une fois ce plan de transition bien établi, un suivi est réalisé au fil des mois et des années afin de mesurer son effet sur la productivité de la ferme, la santé et le bien-être de son troupeau, sa séquestration de carbone ou la réduction de ses GES. La ferme et l’agronome s’ajustent alors, si besoin, avant de passer… à la stratégie suivante!

En dernière analyse, l’approche systémique apporte des changements progressifs et durables aux opérations de la ferme, car elle regarde d’un seul coup d’œil tous les éléments qui la composent. Une fois de plus, Logiag innove en proposant une approche agronomique prometteuse qui évite les coups d’épée dans l’eau et des recommandations qui produisent des effets indésirables.

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